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SEPTIEME

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SEPTIEME
21 février 2014

NOUVEAU SITE LE SEPTIEME

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Retrouvez Le Septième version 2014 sur le nouveau site internet: LeSeptième.fr !!!

Actualités, Bandes annonces, Dossiers thématiques, Evénements, et PDF des versions papiers mensuelles !

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11 septembre 2013

CONJURING, de James Wan

Unknown

Il est vrai que l'avis de Septième sur le film d'horreur grand public de l'année arrive un peu tard (le film est sorti le 21 août), mais le cas mérite qu'on s'y arrête un instant. Le première raison est l'espèce de saut que réalise le travail de James Wan, franchissant la regrettable faille qui séparait le cliché horrifique de son potentiel. Conjuring est sans commune mesure avec les clichés usés et l'esthétique sans consistance d'Insidious, son précédent film, qui ne faisait procéder la peur que de quelques trop rares bonnes idées de mise en scène ou de trop seuls effets sonores et visuels. Le cinéaste et ses collaborateurs changent ici du tout au tout leur projet : la base sera une histoire dite vraie, impliquant donc, au moins, un doute – terrifiant si l'on choisi le film pour joindre cette possible réalité – qui, en dépit de la mode, reste une ressource non négligeable pour le cinéma d'épouvante. C'est précisément le travail d'équipes comme celle de Conjuring qui nous le rappelle. Ici, comme chez Alexandre Aja, on est capable de jouer avec le poncif sans le vider de sa substance. La richesse du montage plastique et la minutie du montage narratif viennent forer un héritage desséché par la paresse créative d'une pensée unique empêtrée dans le lieu commun esthétique. Cependant, on objectera que le développement patient de la mystérieuse affaire et de ses protagonistes nous laissait en droit d'attendre un dénouement plus profond, plus organique. De plus, la richesse de l'ambiance procédant des plans larges en mouvement autant que de l'effrayant décor pittoresque seventies donnait à imaginer à plusieurs reprises la possibilité d'une musique moins présente, ce qui aurait atténué le caractère sensationnel en tant qu'il met cette distance rassurante et frustrante à la fois entre le récit et le spectateur. En somme, l'excellent travail de James Wan sur ce film nous mène, du fait de la peur et donc de l'adhésion qu'il suscite, à exiger d'un cinéma éprouvant comme celui-ci qu'il explore davantage l'univers convoqué (le mysticisme, la famille, le mal) et ose nous mettre face à des questions auxquelles la terreur nous forcerait à chercher des réponses.    

Sébastien Perrin

29 août 2013

STILL MINE

De l'importance des petites choses

Musique mélancolique et douce, quelques gros plans: une main ridée nouant une cravate et attachant des boutons de manchettes. Un viel homme à l'air déterminé et triste occupe tout l'écran. On le retrouve au tribunal, devant un juge l’accusant d’avoir construit une maison sans permis et sans respecter les normes imposées par la loi. Il risque la prison lui rapelle le juge; il le sait bien. Flashback. Le film s’intitule Still Mine et a été réalisé par le canadien Michael McGowan. Sa sortie en France n’est malheureusement pour l’instant pas prévue. Basé sur une histoire vraie, Still Mine raconte comment un octogénaire, Craig Morrison, va jusqu’à braver la loi pour sa femme adorée qui perd peu à peu la mémoire. Très lacrymal le film a emporté toute la salle dans la même émotion. Une réussite étonnante qui s'explique par l'absence de pathétisme. Là où Hollywood aurait tout misé sur le pathos à outrance le film de McGowan mise sur la justesse des sentiments et c’est la sincérité de l’émotion qui traverse l’écran pour toucher le spectateur. Les nombreux gros plans sur des détails tendent à prouver que les petites choses, les petites histoires, sont les plus vraies et les plus attachantes. Magnifiquement interprété par James Cromwell et Geneviève Bujold, Still Mine est une vraie perle sur l’amour et la dévotion, d’une vérité et d’une beauté époustouflante. 

 

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Le récit complet de la séance en avant première à New York en présence de James Cromwell est à découvrir sur le blog News from Overseas !

Clara Muller

10 juillet 2013

SHOKUZAI

Les critiques étaient déjà unamimes sur la puissance du dernier film de Kyoshi Kurosawa. Cette histoire en deux parties multiplie les lignes dramatiques et thématiques, opération difficile quand nous savons à quel point l'homogénéité des éclatements narratifs est souvent assurée de façon superficielle ou maladroite. Ici, l'auteur va loin, pousse son histoire aux frontières d'une impressionnante invraisemblance et en fait le creuset d'une douloureuse mise en perspective des tourments, des actes et des marques laissées par eux. Le récit qu'il en fait, comme ses images, semble d'une perfection géométrique parfois minimaliste afin de ne retenir de la souffrance mise en scène que ce petit quelque chose que le style n'atténue pas et que nous, spectateurs, devons ici affronter.

Sébastien PERRIN

Shokuza

4 juillet 2013

FRANCES HA

 

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FRANCES HA de Noah Baumbach

         On craignait, à voir la bande-annonce, l'ombre de la caricature du film estudiantin stylisé. A tort, mais pas complètement. La fraîcheur et la vitalité des comédiens sont de très bonnes surprises. Greta Gerwig ne semble jamais cesser d'être elle-même, bien qu'on puisse penser parfois qu'elle en fasse trop. Sa complicité avec ses partenaires est un bonheur pour le spectateur qui se délecte des conversations énergiques et inspirées offertes par ce dynamisme partagé des acteurs et du cinéaste (qui a écrit le scénario avec Greta Gerwig). L'histoire fonctionne très bien mais on peut regretter qu'elle n'offre pas d'apothéose satisfaisante, même si cela ne peut être considéré comme un véritable défaut. Les dialogues frôlent parfois la caricature de l'originalité mais ne tombent jamais dans le faux, en grande partie grâce aux comédiens, comme nous l'avons dit. Cette énergie qu'ils donnent au film reste la principale raison - et ce n'est pas négligeable ! - d'aller le voir.    

Sébastien Perrin

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9 juin 2013

All About Eve

          Au cours d’une cérémonie de remises de prix à différentes figures du théâtre, de nombreuses personnalités présentes à cet évènement se remémorent l’histoire d’Eve, à qui sera remise la récompense la plus prestigieuse. Fascinée par le théâtre, cette dernière est parvenue un soir à approcher celle dont elle ne manque aucune interprétation Margo Channing, une comédienne talentueuse et caractérielle. Les deux se lient d’amitié mais tandis que Margo  remet en question sa carrière, ses rôles qu’elle n’a plus l’âge de jouer, Eve perce peu à peu dans le milieu grâce à ses nouvelles relations. Entre succès et manipulations, l’ambition de chacune s’impose aux dépends de leurs proches qui ne parviennent à démêler le faux du vrai. 

 

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           En situant son histoire dans l’environnement mondain du théâtre, Mankiewicz élabore un scénario où il s’intéresse ce qu’il aime, les rapports humains et l’image de la femme. En offrant le rôle de Margo à la talentueuse mais oubliée de l’époque, Bette Davis, celle-ci se retrouve à jouer un personnage avec lequel elle partage de nombreux points communs. Non seulement la force de caractère, c’est le doute d’une fin de carrière face à la nouvelle génération qui les rapprochent.

            Le récit omet d’évoquer l’image publique, la reconnaissance dont jouissent les personnages et se concentre sur le revers de la médaille, la superficialité du milieu. La seule gratitude de l’extérieur est celle des critiques qui peuvent se révéler austères,  voire manipulateurs comme Addison DeWitt, admirablement interprété par George Sanders. La mise en scène s’accorde pour former un contenu intimiste, les lieux servent de toile de fond au tumulte des relations. Finalement, l’extravagance des protagonistes se dégage de leur comportement et de leurs échanges. Il n’est pas anodin si la première apparition de Margo ne la met pas en valeur dans sa loge mais s’applique à découvrir les traits de sa forte personnalité.

         A travers des dialogues ingénieusement construit, les personnages s’avèrent tout aussi détestables qu’attachants. Les propos virulents de Margo attestent de son arrogance,  mais dissimule tout aussi bien sa fragilité tandis qu’Eve, tient un discours humble qui prend progressivement une tournure péjorative. La force dramatique du film repose sur ce cynisme dont il fait preuve. Le tragique s’immisce également en se plaçant comme une mise en abyme, effectivement de nombreux passages évoquent la tragédie élisabéthaine avec son utilisation de la comédie. La forme que prend la narration se joint ainsi au contexte dans lequel elle évolue.

        Alternant critique et admiration, All About Eve puise dans l’histoire riche des arts de la représentation pour se placer comme une œuvre majeure de l’âge d’or Hollywoodien. 

Sarah Menouer

6 juin 2013

GATSBY LE MAGNIFIQUE

Article exclusif, seulement sur le blog

Entre Magnifique et Pathétique 

          The Great Gatsby laisse très partagé. Le début est une terrible déception mais la deuxième moitié emporte tout de même dans l’univers du film et de l'auteur. On pouvait pourtant s'attendre à ce que Luhrmann maitrise mieux la partie festive que la partie tragique mais c’est finalement le contraire qui s'est produit. La débauche d’effets visuels de synthèse dans la première moitié du film est écoeurante et il semble que le réalisateur se soit égaré sur la voie de la 3D grand public. Pour le dire dans des termes vulgaire: "Ca pue le fric". Par contre, en ce qui concerne les acteurs Dicaprio dans le rôle titre s'en sort magistralement, apportant plus d’émotions tragiques à Gatsby que ne l’avait fait R.Redford. Jordan Baker, jouée par Elizabeth Debicki, avec sa silhouette dégingandée, colle bien à son personnage original et Tobey Maguire dans le rôle du narrateur sait se montrer commun et "oubliable" à souhait. En revanche Carrey Mulligan ne parvient pas à la cheville de Mia Farrow dans le rôle de Daisy. Son côté fille riche et gâtée eclipse totalement sa façade rêveuse et un peu folle pourtant si importante pour comprendre le tragique de l'intrigue ! La bande son quant à elle est typique de la filmographie de Luhrmann, colorée, moderne, massive. On détestera ou on adorera, il n'y a pas de milieu. 

          Malgré la déception première, il est tout de même possible de ressortir même assez satisfait de la séance, à nouveau ému et troublé par l'histoire incroyable écrite par Fitzgerald !

21004324_20130508165949851  Clara Muller

6 juin 2013

WILLIAM SHAKESPEARE'S ROMEO + JULIET

Tiré du numéro de Mars de la revue Septième.

 

La souveraineté de la Religion

A l'occasion de la sortie prochaine d'une nouvelle adaptation littéraire du réalisateur australien, dont la version de Gatsby le Magnifique ouvrira le 69ième festival de Cannes, faisons un petit retour sur sa précédente adaptation d'un classique de la littérature anglophone, Roméo + Juliette. Sorti en 1996 le film fait désormais partie des plus célèbres adaptations cinématographiques de l'oeuvre de William Shakespeare.

 

De Shakespeare à Luhrmann:

Dramaturge, poète et écrivain anglais du 16° siècle, Shakespeare est considéré comme l'un des plus grands de la culture anglaise. Sa maîtrise du langage littéraire et de ses formes poétiques ainsi que sa capacité à représenter différents aspects de la nature humaine en ont fait une des éminence de toute la culture occidentale et son influence persiste de nos jours. Parmi la trentaine d'oeuvres théâtrales que l'on connait de lui, on dénombre onze tragédies, douze comédies et neuf drames historiques. Shakespeare rompt avec le théâtre anglais pieux de son époque qui se composait principalement de pièces allégoriques à visée morale (une morale chrétienne, cela va sans dire). Il choisit plutôt de se rapprocher du public en étudiant particulièrement le fond de la nature humaine. Romeo and Juliet , tragédie en cinq actes en vers et en prose, est une œuvre de jeunesse du dramaturge. On y trouve pourtant déjà toutes les caractéristiques du talent de Shakespeare : l'alternance entre scènes tragiques et comiques, le travail de développement des personnages secondaires et l'usage de sous-intrigues pour complexifier le récit. Ainsi les thèmes principaux de la pièces ne se résument pas à l'amour et à la mort mais englobent également la dualité de l'âme humaine, le rêve, la puissance du destin, ou encore la notion de Temps. Baz Luhrmann, après plusieurs succès au théâtre en tant qu'acteur et comme metteur en scène d'opéra, réalise en 1992 son premier film, Ballroom Dancing, le premier également de sa Trilogie du Rideau Rouge qui le rendra célèbre. En 1996 sort son second film, Romeo + Juliette, et en 2001 la trilogie s'achève avec Moulin Rouge!. La Trilogie du Rideau Rouge n'est pas une trilogie au sens traditionnel du terme. Il n'y a en effet aucun lien entre les intrigues de chaque film. Ce qui lie ces trois films ensemble est une technique de réalisation spécifique, contenant un ou plusieurs motifs en rapport avec le théâtre.

Les spécificités du film :

Transposer l'intrigue du Roméo et Juliette dans une époque futuriste et dans un lieu imaginaire, voilà la grande innovation de Baz Luhrmann. Sorte de quartier chaud d'une Amérique puritaine et violente, le lieu de l'action n'est donc plus Vérone mais Verona Beach, et les familles qui s'y affrontent sont des sortes de mafieux que le prince, devenu chef de la police, tente de contenir. Le texte original, en revanche, bien que raccourci, reste mot pour mot celui de Shakespeare, créant un contraste frappant avec le parti-pris de mise en scène du film. Ce sont Leonardo Dicaprio et Claire Danes qui interprètent le couple mythique, 400 ans après les premières représentations de l'oeuvre originale dans l'Angleterre du 16ième siècle.

L'analyse thématique :

Ce film, d'une richesse incroyable, ne peut être commenté exhaustivement dans les deux pages d'un journal tant il prête à l'analyse. Aux analyses même. Choisir un thème, un angle d'entrée dans son univers, s'impose donc pour pouvoir survoler une infime partie de l'oeuvre. Ce thème sera ici la Religion. C'est, il faut l'avouer, une décision en partie arbitraire ; mais le motif religieux jonche le film de telle sorte que ce choix s'impose finalement presque de lui même parmi les autres motifs du film. Il paraît d'ailleurs intéressant de voir comment Luhrmann renoue avec la notion de puritanisme et de morale chrétienne tandis que Shakespeare s'en éloignait. La religion se manifeste principalement dans les décors et accessoires du film si l'on met de côté la présence d'une figure ecclésiastique importante. On remarque en effet très vite une accumulation de signes chrétiens visuellement toujours mis en avant: crucifix, cierges, anges, représentations de la vierge jusque sur les armes et les costumes en passant par des statuettes, et surtout une statue monumentale du Christ évoquant fortement le Christ Rédempteur de Rio de Janeiro. La posture de ce Christ semble pourtant être moins accueillante que celle de Rio et sa main droite prend même des allures accusatrices ou de juge sur certains plans. Il est possible qu'il y ait dans cette accumulation une allusion à la domination de la religion catholique dans l’Italie de la Renaissance mais la profusion incroyable de ces symboles religieux semble aller au delà de cette simple référence historique.

Le réalisateur ne paraît pas attribuer pas la mort des amants au destin (à des « astres défavorables » comme le dit le texte) mais à une sorte de punition divine. Pourtant le texte ne suggère pas réellement un lien entre la fin tragique et la religion et les critiques de la pièce penchent généralement plus vers une mort due au destin, aux actes manqués, ou plus simplement au hasard. La séquence principale mettant en scène la statue du christ est celle où Roméo tue Tybalt. La confrontation entre Dieu et l'homme pécheur est alors clairement suggérée par la mise en scène : Roméo et le christ se font face dans une mimétique dramatisée par la pluie et l'éclairage blanchâtre. La mort des amants découd alors d'un châtiment divin envers la haine déjà meurtrière deux familles. Par ailleurs le geste du prêtre voulant aider les amants en simulant la mort de Juliette peut être considéré comme découlant d'un péché d'hybris. En effet, comme dans l'épisode de la tour de Babel, la chute attend qui veut égaler Dieu. En s'appropriant un semblant du pouvoir de vie et de mort le prêtre commet une erreur dont il ne prend conscience qu'à la fin en se repentant amèrement. L'autre image religieuse omniprésente est celle de la vierge. Un autel entier lui étant consacré dans la chambre même de Juliette, et son premier échange avec Roméo la qualifiant de « sainte », on peut y voir une volonté d'ériger Juliette comme une « vierge profanée » entrainant sa punition et celle de son amant.

Il y a certainement dans ce choix radical un échos à une société actuelle où la violence est omniprésente et où le déni de Dieu au profit du consumérisme a provoqué des retours extrémistes aux religions. Plus généralement, Luhrmann prouve à nouveau l'intemporalité et l'universalité de Shakespeare et de cette histoire. Tant qu'il y aura des hommes, de telles histoires de haine et d'amour existeront toujours, quelque soit le lieu ou l'époque.

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 « Les transports violents ont des fins violentes et meurent dans leur triomphe. » W. Shakespeare

Clara Muller

6 juin 2013

After Earth

 

After Earth

de M. Night Shyamalan

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On pouvait voir à la bande-annonce que le chef-d'œuvre n'était pas au rendez-vous. Les plus raisonnables s'en sont tenus là, d'autres, par curiosité ou par un fol espoir, ont dit « After Earth » au vendeur de places. La séquence d'entrée montre plus en détail l'étiquette du produit : une explication voix-off à l'appui de la situation géopolitique dans laquelle nos héros se trouvent, en partant, pédagogie plus dynamique, de notre présent. Même les enfants les plus jeunes ne méritent pas un artifice aussi paresseux. Quant à l'univers esthétique, fort peu original, il contribue surtout à banaliser les images de synthèse médiocres, à l'instar, semble-t-il, du cinéma spectaculaire contemporain. Nous sommes effectivement loin du véritable intérêt dramatique et plastique que Spielberg, Lucas ou même Cameron ont porté aux nouvelles technologies. Inutile d'ajouter que la bande musicale participe tout autant de cette monotonie sans ambition qui caractérise les films mort-nés.  

Sébastien Perrin

22 mai 2013

CONCERT HOMMAGE A JOHN WILLIAMS

Tiré du numéro de Mars de la revue Septième.

La Grande Musique de Films

 Le 15 Mars dernier la Salle Pleyel était comble pour un concert exceptionnel en hommage au travail du compositeur John Williams, connu principalement pour sa remarquable et longue collaboration avec Steven Spielberg. Sous la direction de Frank Strobel, l'un des plus éminents chefs d'orchestre dans le domaine de la musique de film, le London Symphony Orchestra a majestueusement interprété une quinzaine d'extraits musicaux tirés de douze films différents. Ce concert, premier d'une série consacrée à la musique de film, se voulait l'annonciateur de l'exposition qui s'ouvrait quelques jours plus tard à la Cité de la Musique : « Musique & Cinéma, le mariage du siècle ? » dont l'ambition est d'éclairer ce qui se joue dans la rencontre de ces deux arts (jusqu'au 18 Août 2013).

Complet depuis des mois cet événement constituait l'un des temps fort de la programmation de la Salle Pleyel cette saison. Les moyens mis en oeuvre pour cette soirée ne permettaient pas d'en douter.

Pour commencer, la sollicitation de l'orchestre symphonique de Londres pour jouer ce programme atypique était un choix très symbolique car, outre l'excellence du LSO il s'agit également d'un orchestre dont la relation au cinéma est privilégiée depuis plus de quatre-vingt-dix ans ! En effet, dès sa fondation en 1904, le LSO accompagne les projections de films muets, puis en 1934, L'homme qui en savait trop de Hitchcock lance réellement le LSO dans le monde du cinéma. Dès lors l'orchestre participera chaque année à de nombreuses productions cinématographiques et sera même le sujet principal du film Instruments of the Orchestra.

Par ailleurs l'installation d'un grand écran au dessus de l'orchestre permettait de projeter des extraits de films. Les spectateurs on ainsi pu retrouver quelques images de Jurassic Park, Les Dents de la mer, La Liste de Schindler, Indiana Jones, Hook, La Guerre des mondes, Rencontres du troisième type, L'Empire du soleil, Le Terminal ou bien encore E.T. Le choix de ne pas projeter d'extraits en continu ou de les remplacer parfois par des diaporamas était particulièrement judicieux, l'attention étant sinon inévitablement attirée par les images mouvantes plutôt que par les musiciens.

Enfin, si certaines projections lumineuses sur les murs de la salle s'avéraient intéressantes, par exemple dans le cadre d'une mise en ambiance pour la musique des Dents de la mer, d'autres en revanche étaient parfaitement inutiles voire même désagréables.

Musicalement, car c'est bien ce qui compte lors d'un concert, les quatre-vingt-quinze musiciens du London Symphony Orchestra ont fait preuve d'une merveilleuse cohésion et livré de splendides interprétations. Les sections violoncelles et contrebasses ainsi que le clarinettiste soliste ont particulièrement excellé. Quant au concert master, Carmine Lauriqui, pour La Liste de Schindler, s'est improvisé soliste, il a interprété le thème principal avec la même émotion que le grand Itzhac Perlman dans la version originale.

Ce qui a certainement paru surprenant aux spectateurs au début du concert était l'absence du programme de la pièce la plus grandiose et connue de Williams, une des musiques de film les plus célébrées de tous les temps, celle de Star Wars. Un concert hommage à John William sans cette composition inoubliable semble être une erreur passible de lynchage ! C'est pourquoi il était certain que retentirait en bis les cuivres triomphants de la Guerre des Etoiles. Quel surprise alors (et quelle déception !) lorsque le bis s'avère être la bande originale de Munich (de Spielberg), pourtant magnifique et enjouée. Le deuxième bis redonne le sourire avec un extrait endiablé de 1941 (toujours Spielberg) dont la musique, une marche, possède un pouvoir comique indéniable. Enfin, un énième retour de Strobel sur la scène, alors que la tension dans la salle est à son comble et que les applaudissements se font pressants, semble annoncer les notes tant attendues. D'un signe de la main il calme l'audience en lui assurant l'imminence de ce qu'elle attend depuis le début, il lève sa baguette et lorsque son bras s'abaisse c'est l'explosion symphonique. La salle se lève comme un seul homme et des cris de joie retentissent pendant quelques secondes avant que l'excellence de la musique ne les réduise au silence admiratif. Pas d'extraits vidéos pour accompagner ce final, simplement la grandeur de la musique de Williams qui est à n'en pas douter à l'origine d'une grande part du succès phénoménal de la saga de Georges Lucas. Un moment magique rendu possible par la rencontre de deux arts et de deux maîtres.

John Williams, est, on le sait, un grand compositeur pour le cinéma, de même que l'étaient Nino Rota, Bernard Herrmann, Bill Conti, Elmer Bernstein, Ennio Morricone et bien d'autres, mais il est également un compositeur de concert et un chef d'orchestre talentueux. Son écriture, maîtrisée, pleine de références et héritière d'un siècle de musique hollywoodienne, est un brillant exemple de la musique orchestrale.

Sa rencontre en 1974 avec Steven Spielberg pour Sugarland Express est le début d'une collaboration dont le réalisateur ne pourrait aujourd'hui plus se passer. Quelque notes de l'un évoquent désormais immanquablement les images de l'autre et on trouve dans cette collaboration quelque chose de l'essence de la musique de film.

Ce concert, pour lequel des groupes d'anglais ont tout spécialement traversé la Manche, prouve que l'alliance musique et cinéma est décidément une recette à succès. Même pour la plus somptueuse interprétation de la plus belle symphonie de Beethoven ou Tchaïkovski, personne à la Salle Pleyel ne se lève ni ne manifeste le même enthousiasme que celui qui a envahi la salle le soir du 15 Mars. La musique de film rassemble des amateurs de tous âges et de tous milieux dans une passion et une excitation partagée. Des cris, des larmes même, la musique de John Williams ne laisse personne indifférent, parce qu'elle est d'une immense qualité d'une part mais également parce que le cinéma rassemble comme aucun art n'a su le faire. Voilà comment deux arts fusionnent et se complètent pour atteindre une audience plus large et transmettre une émotion décuplée. 

Clara Muller

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